« C’est un vrai despote avec ses enfants. » Quand mon demi-frère Van Hien entend ces paroles, un sourire satisfait se dessine sur son visage.

Eh non, il n’est pas du genre à astreindre ses enfants à des corvées interminables, ni à les enfermer dans leur chambre pour qu’ils étudient ou pratiquent le piano. Mais lorsqu’il est question d’argent, là, c’est une autre paire de manches.

Très tôt, Van Hien et sa conjointe Manon ont décidé d’apprendre aux enfants à consommer, épargner et budgéter. « Je les imaginais dans 15 ans, dit mon demi-frère, et je voulais m’assurer qu’ils soient autonomes. »

Van Hien et Manon se sont donc efforcés de toujours discuter des questions financières devant leurs enfants et d’en profiter pour leur expliquer quelques notions de base. Par exemple, leur expliquer pourquoi on souscrit à une assurance habitation. « Même de très jeunes enfants peuvent comprendre la logique de l’assurance », affirme-t-il.

`Ils ont aussi pris soin de véhiculer certaines valeurs importantes pour eux, comme le mérite de gagner soi-même son argent. Résultat, à la préadolescence, Raphaël, Marika et Xavier ont tous commencé à travailler – en gardant des enfants ou en distribuant le journal.

« Comme ils touchaient maintenant un salaire, j’en ai profité pour les initier à l’épargne », raconte Van Hien. L’intervention a été bénéfique. Les enfants ont tous épargné et ont maintenant des dépôts à terme à leur nom. À l’âge de 14 ans, Raphaël, le plus économe, y a placé 5 000 $.

Enfin, au début de l’adolescence, Van Hien et Manon ont jugé qu’il était temps de les initier au budget. Ils ont aussi établi des règles strictes pour encadrer leur contribution aux dépenses des enfants. Par exemple, lorsque Raphaël et Marika leur ont demandé pourquoi ils n'avaient pas de cellulaire comme tous leurs amis, la réponse a été tranchante. « Nous n’avons pas l’intention de vous en acheter parce que ça ne répond pas à un besoin. » Par contre, Van Hien leur a expliqué qu’ils pouvaient très bien en acheter un avec leur propre argent s’ils avaient le sentiment que c'était essentiel. « Ils ont automatiquement abandonné l’idée », dit-il.

Sur la question des voyages, Van Hien et Manon ont établi qu’ils contribueraient uniquement à ceux à but « éducatif » et qu’ils paieraient 50% du coût, jusqu’à concurrence de 1 000 $. Ainsi, quand Marika, 16 ans, leur a parlé il y a deux ans d’un voyage au Maroc organisé par l’école, ils se sont assis avec elle pour évaluer le projet. Le coût du voyage étant de 3 900 $, Marika devait trouver 2 900 $ en deux ans. « Nous lui avons démontré qu’avec ses économies, l’épargne qu’elle pouvait encore réaliser et les activités de financement de l’école, elle pouvait amasser cette somme », dit Van Hien.

Évidemment, l’approche de mon demi-frère peut paraître sévère pour de nombreux parents qui n’encadrent pas du tout leurs enfants et obéissent à tous leurs caprices. Mais Van Hien, lui, est bien placé pour en constater les bienfaits. Ses enfants ne cessent de le surprendre agréablement par leurs décisions d’achat et d’épargne.

Par exemple, combien de parents peuvent dire que leur garçon de 19 ans pense acheter un condo dans un proche avenir? Raphaël, lui, sera en mesure de le financer lui-même, même s'il est encore aux études. Évidemment, il a la chance que ses parents garantissent l’emprunt, mais il n'en reste pas moins que c'est lui qui a eu cette idée et qui a trouvé les solutions pour la réaliser.

En fait, lorsqu’on y regarde de plus près, même si mon demi-frère peut paraître strict en encadrant la relation de ses enfants avec l’argent, il leur a donné quelque chose de merveilleux: une plus grande liberté d’action… Grâce à lui, ses enfants peuvent maintenant financer des projets avec leur épargne, et ils ont confiance en leur capacité à prendre de bonnes décisions financières.